Comment les chinois copient Tesla ?

Dans cet article, on va voir comment certains constructeurs de voitures électriques chinois en arrivent à copier Tesla à un tel point que leurs voitures frisent la contrefaçon.

Si vous êtes entrepreneur, et que vous avez réussi à implémenter une idée qui marche très bien sur le marché, attendez-vous à ce que d’autres personnes, motivées par votre nouveau succès, essaient de la dupliquer et de s’approprier une portion de vos revenus.

Ceci est l’un des piliers sur lequel est fondé le capitalisme. La compétition fait naître l’innovation, et c’est tout au profit du consommateur. Mais quand-est ce qu’est-ce-que cela va trop loin ? Quelles sont les frontières entre copier, et voler ?

L’histoire de Xpeng et de sa rivalité avec Tesla.

En 2014, Elon Musk, le PDG de Tesla, avait déclaré qu’il ouvrait les brevets de l’entreprise à tout constructeur automobile désireux de produire des voitures électriques, promettant que Tesla n’engagerait pas de poursuites judiciaires en matière de brevets contre quiconque, qui, de bonne foi, souhaiterait utiliser leurs technologies.

Selon Elon Musk, cette nouvelle politique a été mise en place afin d’accélérer la transition énergétique mondiale – ce qui est, après tout, la mission de Tesla, et afin encourager d’autres constructeurs à se lancer sur la voie de l’électrique.

“Si nous ouvrons la voie à la création de véhicules électriques attrayants, mais que nous posons ensuite des mines de propriété intellectuelle derrière nous pour inhiber les autres, nous agissons de manière contraire à cet objectif”, a-t-il déclaré.

Il a également ajouté que Tesla continuerait à déposer des brevets à l’avenir, mais uniquement pour empêcher d’autres entités de breveter leurs innovations.

Et c’est justement durant cette même année que Xpeng, le constructeur de véhicules électriques chinois, voit le jour. A partir de ses humbles débuts 7 ans auparavant, la compagnie a rapidement gagné en notoriété en Chine, et commence à s’introduire petit à petit sur la scène internationale.

Quel est donc son secret ?

Henry Xia, le fondateur de Xpeng, a admis ouvertement qu’il avait été inspiré par Tesla pour lancer sa start-up de véhicules électriques en 2014, et spécialement par l’annonce d’Elon Musk sur la mise en libre accès des brevets de Tesla.

Xpeng aurait été la première entreprise à aborder Tesla pour utiliser ses brevets gratuitement.  Cependant, Xpeng est allé un peu plus loin que ce que Tesla avait prévu.

Mais regardez plutôt par vous-même. Voici le site web qu’Xpeng a lancé pour leur modèle P7. Ça ne vous dit pas quelque chose ?

Vraiment, on pourrait très facilement le confondre avec le site web de Tesla. Ce n’est qu’en regardant le nom du modèle que l’on pourrait se rendre compte que quelque chose n’est pas à sa place !

Mais vous pensez peut-être que j’exagère un peu. Oui, les sites web sont un peu similaires, et Xpeng aurait pu faire un peu plus d’efforts pour produire quelque chose de plus original. Mais c’est quand même une compagnie qui vaut plus de 35 milliards de dollars sur le marché boursier. Ils ont même eu droit à un documentaire sur le Wall Street Journal. Ils doivent sûrement rapporter de la valeur ajoutée au monde, non ?

Eh bien, cloner le site web de Tesla était juste la première étape du plan de Xpeng. En gros, l’ambition de Xpeng est de créer un clone chinois de Tesla. Ils semblent prendre ce rôle très au sérieux, commençant par le site web, et allant jusqu’à copier les véhicules eux-mêmes.

Rien n’a été laissé au hasard sur cette tâche méticuleuse. Voici le Xpeng G3, un SUV électrique de la compagnie chinoise, qui offre environ 230 km d’autonomie.

Alors, même si l’extérieur n’est pas complètement copié, la partie avant – avec ses bandes de phares à LED, son capot en forme de coquille rainurée, l’arc du pilier en A, et le toit panoramique foncé – on peut dire que tout cela a de fortes racines dans le Model X de Tesla.

Mais qu’en est-il de l’intérieur ? Eh bien, c’est une toute autre dimension…

L’intérieur est étrangement similaire à celui de la Tesla Model X : on retrouve un design minimaliste similaire pour les sièges avant, avec leurs appui-têtes intégrés dans les épaulières ; une console centrale similaire (bien qu’un peu plus haute) ; les mêmes pédales de commande sur le volant ; un tableau de bord numérique avec des graphiques pseudo-Tesla; et bien sûr, l’écran central vertical emblématique des anciennes Model X et Model S de Tesla.

Non seulement l’orientation, la position, la taille et l’inclinaison de l’écran paraissent familières. Mais le SUV électrique semble même copier la disposition, les raccourcis de menu, les graphiques, et la police de l’interface utilisateur de la Model X.

Alors que Tesla a gardé ses brevets technologiques en libre accès (comme ses méthodes de recharge hi-po et le format des cellules de batterie 18650) dans le but d’aider les jeunes entreprises de véhicules électriques à se lancer, le design de ses modèles ne l’est pas.

Ainsi, Xpeng n’a pas seulement tiré parti de la technologie de Tesla (c’est normal, c’est légal après tout), mais ils ont a également reproduit sa personnalité esthétique.

Xpeng a également repris beaucoup de fonctionnalités qui étaient uniques à Tesla, comme l’Autopark, le Phone Key, ainsi que l’essence de l’autopilote de Tesla. Un point sur lequel on reviendra plus tard.

 

Assez curieusement, le Wall Street Journal a omis de mentionner ces points dans son documentaire en parlant de ces fonctionnalités dans les voitures de Xpeng. Ils ont plutôt opté à les décrire comme « la stratégie de Xpeng pour se démarquer de la compétition ».  C’est, en effet, une manière assez étrange de se distinguer !

La stratégie commerciale de Xpeng

Comme vous l’avez compris, le modèle commercial de Xpeng est assez simple. Pour rivaliser avec Tesla, ils créent des voitures électriques qui ressemblent beaucoup à ceux de la compagnie californienne. Cependant, grâce à l’utilisation de matériaux moins chers, et à leur recours aux subventions chinoises, ils peuvent les fabriquer pour moins cher, et donc les vendre pour un prix moins élevé qu’une Tesla.

Évidemment, les voitures ne seront pas des copies 100% conformes à des Tesla, aussi bien au niveau esthétique que des performances, mais elles seront suffisamment similaires pour que de nombreux clients potentiels ne se soucient pas de la différence.

En tant que société chinoise, Xpeng a commencé par produire et vendre ses voitures en Chine. Cela les mettait déjà dans une situation assez avantageuse, puisqu’ils pouvaient d’emblée profiter du plus grand marché de voitures électriques au monde, ainsi que de bénéficier des subventions du gouvernement chinois, qui offre son soutien aux constructeurs de véhicules électriques.

Cependant, le plus grand avantage de Xpeng est qu’en Chine, il est beaucoup plus difficile de faire respecter les droits de propriété intellectuelle. Cela leur permet de maintenir leur modèle commercial, et de continuer à gagner en notoriété.

Même si Tesla avait rendu ses brevets en libres d’accès, ils n’ont probablement pas anticipé le fait de se faire copier à ce point par un concurrent, qui a effectué très peu de changements au-delà de créer des clones des voitures de Tesla.

Après avoir posé un pied ferme sur le marché Chinois, Xpeng souhaite s’étendre davantage, et s’installer activement sur la scène internationale.  Vers la fin de l’année 2020, ils ont commencé à livrer leurs SUV électriques J3 en Norvège.

Ils aspirent également à s’étendre aux pays européens voisins, et pourraient même potentiellement se rendre aux États-Unis, où ils seraient alors en concurrence directe avec Tesla sur son propre terrain de jeu. Cela en devient presque comique.

Les controverses crées par l’usurpation de Xpeng

 

Pour l’instant, on pourrait reprocher à Xpeng un manque cruel d’originalité, et un certain mépris pour l’éthique ; Mais si leurs clones proviennent d’information en libre accès, on ne peut pas les accuser d’enfreindre la loi.

Enfin, pas tout à fait à vrai dire… et c’est ici que les choses se compliquent, vous allez voir..

En Juillet 2019, Guangzhi Cao, un ancien ingénieur de Tesla, a admis avoir téléchargé des fichiers zip contenant le code source de l’Autopilote Tesla sur son compte iCloud personnel, avant de quitter l’entreprise un peu plus tard.

Tesla a déposé une plainte contre Cao en mars 2019. L’ancien employé était l’une des 40 personnes ayant un accès direct au code source de l’Autopilot, le système avancé d’aide à la conduite de Tesla. La société a affirmé que Cao avait commencé à télécharger des “copies complètes du code source de Tesla relatif au pilote automatique” sur son compte iCloud personnel dès fin 2018.

Cao aurait compressé et déplacé plus de 300 000 fichiers et répertoires liés à l’Autopilot, selon la plainte.

Cependant, Cao a nié avoir volé des informations sensibles au constructeur automobile. Son équipe juridique a fait valoir qu’il avait “déployé des efforts considérables pour supprimer et/ou retirer tous les fichiers Tesla de ce type avant sa séparation de Tesla”.

Et devinez pour qui travaille Cao depuis cette affaire ? Tenez-vous bien, car c’est digne d’un film d’espionnage ! Cao est désormais “responsable de la perception” chez Xpeng, où il « développe et fournit des technologies de conduite autonome pour les voitures de série », selon son profil LinkedIn.

Elon Musk ne semble pas tout à fait convaincu, et pour cause. Il a accusé Xpeng d’avoir développé leur autopilote à partir du code source de Tesla, que Cao leur a fourni, citant un cas similaire d’un ancien employé d’Apple qui aurait fait la même chose au profit de Xpeng.

En effet, un ancien employé qui travaillait sur le projet secret de voiture autonome Apple a été accusé par le FBI de vol de secrets commerciaux en juillet 2018.

Cet employé aurait transféré des données sensibles sur l’ordinateur portable de sa femme, et avait également été filmé par une caméra de vidéosurveillance alors qu’il quittait le campus d’Apple avec une boîte de matériel.

Il avait quitté son emploi chez Apple pour prendre un poste chez XPeng avant d’être arrêté par le FBI.

D’après son profil LinkedIn, Cao avait également occupé le poste de responsable scientifique des images chez Apple pendant deux ans avant de rejoindre Tesla.

Drôles de coïncidences, vous ne trouvez pas?

Si ces allégations sont vraies, cela signifierait que Xpeng a acheté des données volées de Tesla et Apple, dans le but de créer une voiture autonome qui pourrait théoriquement concurrencer les deux entreprises, grâce à leurs propres données.

Outre le fait que les choses semblent très suspectes, il n’y a actuellement rien de concret dont Xpeng pourrait être accusé. Bien que Tesla et Apple soient convaincus d’avoir été pillés industriellement par Xpeng, le manque de preuves solides concernant cette affaire est à déplorer.

Comme le dit le célébre dicton de Pablo Picasso : « les bons artistes copient. Les grands artistes volent ». Et Xpeng semble être très motivé pour laisser sa trace comme l’un des plus grands artistes de notre époque !

Elon Musk : une figure d’exception à la tête de Tesla

Malgré toute cette controverse, Elon Musk maintient d’excellentes relations avec la Chine, et est vu comme un modèle à suivre par les entreprises ainsi que par la population chinoise.

 

En effet, Les géants de l’internet chinois, autrefois célébrés comme des moteurs de la vitalité économique, sont désormais méprisés pour avoir exploité les données des utilisateurs, abusé des travailleurs, et étouffé l’innovation. Par exemple, Jack Ma, cofondateur du titan du commerce électronique Alibaba, est désormais une idole déchue en Chine.

Mais il y a une figure technologique qui a réussi à garder le public chinois sous son emprise, dont le mélange de troll espiègle et de bravade de capitaine d’industrie semble taillé sur mesure pour cette période de rêves déçus et de désillusion : Elon Musk.

“Il peut combattre la hiérarchie et devenir l’homme le plus riche de la planète – et éviter de se faire battre dans le processus”, a déclaré Jane Zhang, la fondatrice et directrice générale de ShellPay, une entreprise de blockchain à Shanghai. “Il est l’espoir de tout le monde”.

Que ce soit par espoir, par envie ou par curiosité morbide – comme les spectateurs qui espèrent voir l’une de ses fusées s’écraser dans une explosion – la Chine ne se lasse pas d’Elon Musk. Les voitures électriques Tesla se vendent bien, même très bien dans le pays, et les ambitions spatiales croissantes du gouvernement chinois ont donné naissance à une communauté de fans qui suivent chaque lancement de SpaceX.

Tesla a accumulé tellement de succès que la compagnie devait forcément inspirer des copieurs et des voleurs. Malgré ces défis, la Chine continue à travailler en étroite collaboration avec Elon Musk et Tesla, formant une relation symbiotique assez particulière.

Il semblerait que tant que Tesla continuera à fabriquer des véhicules hors du commun et à être leader sur le marché des véhicules électriques, il y aura toujours des gens qui les copieront pour tenter de s’approprier une partie de leur succès.

Peut-être même que c’est là le seul et unique moyen d’essayer de les concurrencer. Puisque les brevets de Tesla sont open source, il serait alors judicieux de les exploiter et de ne pas avoir à réinventer la roue.

Tesla n’a manifestement pas laissé la concurrence l’empêcher de créer et d’innover jusqu’à présent, et il est presque certain qu’elle ne la laissera pas l’arrêter à l’avenir non plus.

Après tout, même si vous copiez Tesla du mieux que vous pouvez, vous n’êtes toujours pas l’original et vous serez toujours second !

Et vous, qu’en pensez-vous ? Que pensez-vous du modèle commercial de Xpeng ? Est-ce que vous croyez que les allégations les concernant sont vraies ? Et est-ce que vous achèteriez une voiture Xpeng à la place d’une Tesla si la différence de prix est importante ?

A bientôt pour un nouvel article.

 

 

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